Le point de rupture (1)
L’inspecteur Stévenon observait la scène du crime.
Son assistante se tenait légèrement en retrait, légèrement de biais.
C’est-à-dire en arrière et penchant sur la gauche, un petit peu.
L’équipe l’appelait Pépita Dominguez suite à une mauvaise blague qui avait fait mouche.
Son vrai nom était Claire, Claire Séchu.
Elle n’en parlait à personne, mais elle était follement amoureuse de l’inspecteur Stévenon.
Le point de rupture (2)
Ce sont des choses qui arrivent, dans la police des homicides, avec le quotidien difficile, de tomber raide dingue d’un collègue.
La douceur singulière de l’inspecteur, ses gestes souvent inachevés, cette façon qu'il avait de mener à bien avec humilité les enquêtes les plus coriaces: Pépita Dominguez était tombée sous le charme, irrémédiablement.
– Quel carnage, hein ? dit quelqu’un du côté des légistes.
Le point de rupture (3)
L’inspecteur Stévenon sortit une nicorette.
Cela faisait quinze ans qu’il en consommait.
– Longtemps qu’on n'avait pas eu de meurtre aussi cracra, continua le même type bien que personne ne l’ait relancé. A ce niveau-là…
Pas besoin de terminer la phrase, on avait compris : à ce niveau-là, compliqué de parler de victime.
S’il fallait désigner l’amas visqueux qui se trouvait au centre de la pièce, "flaque de sang avec des grumeaux" fonctionnait mieux.